J’ai provoqué les nuées,
échafaudé les tracés, sinueux ..
J’ai convoqué par milliers,
les fiévreux exaltés,
les peinés, les vexés.
Invités des coriaces, des fugaces,
Aux déboires partagés.
M.G
J’ai provoqué les nuées,
échafaudé les tracés, sinueux ..
J’ai convoqué par milliers,
les fiévreux exaltés,
les peinés, les vexés.
Invités des coriaces, des fugaces,
Aux déboires partagés.
M.G
Je remercie une nouvelle fois Babélio et sa masse critique et les éditions Illador.
J’apprécie cette couverture nervurée, texturée, sobre, le marque-page joint pour ce recueil de » poèmes jazz ».
Il est subdivisé en sections : la première me semble plus aérienne, pétillante, de 1999, plus hivernale, ambrée,
hommage au « Raisin blancs de nuit », au « Rosbif-purée » et promesse d’une « extase sous champagne », promesse d’une douce ivresse…
p.11
Extase sous champagne
« Piper sous Gauthier
Délace ton corset
Dégrafe ta robe écarlate
Dévoile tous les délices
D’une vie dissolue
Plaisirs contenus
Soudain éclate
Une goutte perdue glisse
Sur une courbe si douce
Le bateau ivre tangue vers le précipice
Croisière éphémère comme la mousse
Les yeux se ferment
Les paupières plissent
Une seconde éternelle
Avant qu’elle ne s’évanouisse »
Paris, heure d’hiver 99.
La seconde section invite davantage aux voyages « LETTERS FROM NYC », notes qui sonnent tout de suite plus jazzy,aux accents anglo-saxonne, « JAZZ » DEEP BLUE » plus rythmé, court, plus électrisant,
entre « Dope » et « SPEED »
glisse un « So nervous »p.39
« DOPE » p.29
Coke
Smoke
Poke
Echo
Et Comm
Epoque
Summertime 2012
pour finir sur un « automne à Pékin » p.46/ 47
La troisième « Fractales et mises en abîme rend hommage à Aimé Césaire », datée 2015/2016 et s’imbrique parfaitement, puis vient l’été 2016 « Percussions from Pacific Ocean »
« Plume
Colombe
Dans l’orage
Entre les gouttes
Pluie battante
Un éclair zèbre
Un ange tombe et s’élève
Bâton un bec fin
Un message
Une annonciation »
August 2016,
p.71″
qui s’achève sur « PARADORS,CHATEAUX FORTS ET MIRAGES »,
le dernier me plaît bien,
« EMPREINTES INDELEBILES
Je rêve de porter un tatouage invisible
Connu de moi seul
Contenant mon code secret de fabrique
Il crypterait tous ceux que j’aime
Et me connecte à eux en un milième
Je rêve d’une musique faite de silences
Et des soupirs en alternance
En sens-tu le rythme?
Elle me bercerait et m’accompagnerait
Dans mes songes et mon esprit ensommeillé
Je rêve d’une photo sans image
Une invitation à une méditation profonde
Sans maître du jeu, sans énigme
Elle me plongerait dans un bain révélateur
Fixant sur ma rétine et ma mémoire tant de pixels
Je rêve d’un poème sans mots
Tout en douceur et en imagination
Les pensées venant en nuages
Couvrant d’un nouveau voile, un palimpseste mille fois gravé
Tant de messages effacés à déchiffrer
Pour me comprendre_M.Berger, November 2016. »p.96,
petite précision de l’éditeur, qui nous dit que
« Étienne Desmet est né en 1961. De formation supérieure aux États-Unis et en France, il travaille dans l’enseignement et le développement des talents. Pianiste jazz, passionné de spiritualité et de psychanalyse, il aime faire la cuisine pour sa famille et ses amis. L’écriture est plus intime. Ses textes ont été contés lors de concerts de jazz. «
Au gré de mes lectures et relectures des poèmes, j’entendais les échos, rythmiques tantôt lancinantes,
tantôt nerveuses,
une belle rhapsodie intérieure.
LIGNE
« En ouvrant mon cahier de texte
Un oiseau s’est envolé
Les carreaux juxtaposés, peut-être?
M.G
Le printemps, 1872, Claude Monet.
Le printemps me plaît.
Le printemps me plaît… J’erre avec délices
Dans les champs joyeux, avec les moineaux ;
Je contemple tout : les riches calices,
Les insectes d’or et les foins nouveaux.
Ninetta là-bas relève sa robe,
Et, pour passer l’eau, montre son bas blanc :
Par le sang du Christ ! l’homme, roi du globe,
Devant ce pied-là se sent tout tremblant !
Le printemps me plaît… Je dis des folies !
Je suis sérieux, à la fois, et gai.
D’azur et de miel les fleurs sont emplies :
Pour suivre Nina j’ai passé le gué.
Bonjour, Ninetta ! j’éprouve en mon âme,
Dieu me le pardonne ! un trouble connu…
Viens, repasse l’onde en mes bras, ô femme,
Ou livre au ruisseau ton joli pied nu !
Le printemps.
Gentils oiseaux, venez à ma fenêtre,
Ce blanc duvet est pour vos petits nids ;
Je sens aussi que le printemps va naître,
Mon cœur ému s’épanche au sein des nuits.
Les fleurs déjà dégagent leurs corolles,
Leur corset vert ne craint plus les autans ;
Voici les jours des jeux, des danses folles,
Jolis oiseaux, célébrons le printemps.
Présage heureux, la nature féconde
Sème de fleurs le lit de son époux ;
Partout l’amour devient la loi du monde
Et les amants ont des regards plus doux.
Voici venir l’heure de la tendresse,
L’heure joyeuse aux baisers éclatants ;
Buvons donc tous aux coupes de l’ivresse ;
Jolis oiseaux, célébrons le printemps.
Oh ! connue vous que n’ai-je aussi des ailes
Pour m’envoler sous les bois odorants !
Que n’ai-je aussi des caresses nouvelles
Pour apaiser mes pensers délirants !
Mais ici-bas, solitaire et rêveuse,
Je ne connais que les tristes instants ;
Combien pourtant je voudrais être heureuse !
Jolis oiseaux, célébrons le printemps.
En écoutant la chanson si jolie
Que vous jetez aux vents de l’horizon,
Je sens mon cœur pris de mélancolie,
Et de désirs qui troublent ma raison,
Après ces chants qui peignent votre flamme,
De volupté je vous vois palpitants ;
Et moi j’attends à qui donner mon âme ;
Jolis oiseaux, célébrons le printemps,
N’ai-je pas droit à la faveur céleste,
Au tendre amour, à ma part de bonheur ?
La vie, hélas ! serait un don funeste
Si l’on devait languir dans le malheur ;
Mais Dieu jamais ne manque à ses promesses,
Il fit un cœur pour tout cœur de vingt ans.
Je suis aimée, allons ! plus de tristesses,
Jolis oiseaux, célébrons le printemps.
François-Marie Robert-Dutertre.(1815-1898)
Recueil : Bonheur (1891).
La neige à travers la brume
Tombe et tapisse sans bruit
Le chemin creux qui conduit
A l’église où l’on allume
Pour la messe de minuit.
Londres sombre flambe et fume ;
La chère qui s’y cuit
Et la boisson qui s’ensuit !
C’est Christmas et sa coutume
De minuit jusqu’à minuit.
Sur la plume et le bitume,
Paris bruit et jouit.
Ripaille et Plaisant déduit
Sur le bitume et la plume
S’exaspèrent dès minuit.
Le malade en l’amertume
De l’hospice où le poursuit
Un espoir toujours détruit
S’épouvante et se consume
Dans le noir d’un long minuit…
La cloche au son clair d’enclume
Dans la cour fine qui luit,
Loin du péché qui nous nuit,
Nous appelle en grand costume
A la messe de minuit.
Paul Verlaine.
Recueil : Paysages et paysans (1899).
Dure au mordant soleil, longtemps épanouie
Aux grands effluves lourds et tièdes du vent plat,
La neige, ayant enfin fléchi, perdu l’éclat,
Venait de consommer sa fonte sous la pluie.
L’espace détendu ! le bruit désemmuré !
Et les cieux bleus, enfin ! pour mes regards moroses,
Avides de revoir le vieil aspect des choses,
Tout surgissait nouveau du sol désengouffré.
Soudain, au creux d’un ravin noir,
Un soupçon de neige fit voir
Sa tache pâle, si peureuse
Que je me figurai, songeur,
Un dernier frisson de blancheur
Au fond d’une âme ténébreuse !
Recueil : La poésie dans les bois (1845).
L’hiver est sorti de sa tombe,
Son linceul blanchit le vallon ;
Le dernier feuillage qui tombe
Est balayé par l’aquilon.
Nichés dans le tronc d’un vieux saule,
Les hiboux aiguisent leur bec ;
Le bûcheron sur son épaule
Emporte un fagot de bois sec.
La linotte a fui l’aubépine,
Le merle n’a plus un rameau ;
Le moineau va crier famine
Devant les vitres du hameau.
Le givre que sème la bise
Argente les bords du chemin ;
À l’horizon la nue est grise :
C’est de la neige pour demain.
Une femme de triste mine
S’agenouille seule au lavoir ;
Un troupeau frileux s’achemine
En ruminant vers l’abreuvoir.
Dans cette agreste solitude,
La mère, agitant son fuseau,
Regarde avec inquiétude
L’enfant qui dort dans le berceau.
Par ses croassements funèbres
Le corbeau vient semer l’effroi,
Le temps passe dans les ténèbres,
Le pauvre a faim, le pauvre a froid
Et la bise, encor plus amère,
Souffle la mort. — Faut-il mourir ?
La nature, en son sein de mère,
N’a plus de lait pour le nourrir.
Arsène Houssaye.
Renaissance
De nouveau tu te présentes
Jardin juxtaposé, trouble de la sève
T’emparer du corps
Du cerveau au thorax tu veux scanner son esprit
Les larmes coulent sur le visage d’une femme
Elle sait
Elle connaît la vérité de la solitude
Elle respire la décadence
Imminente
Elle crie son amour
Tentacules méprisants s’entortillant autours des ganglions
Sans pitié tu convoites tout l’être
Il t’attend depuis toujours
Depuis le jour où tu es parti avec son odorat
Ne lui laissant plus absorber le parfum du monde
Rendant chaque jour immanquablement le dernier
Sybille Rembard, 2009
M.G
Je remercie en premier lieu Babélio dans le cadre de sa dernière opération Masse critique et les éditions « Le Castor Astral » pour cette jolie découverte poétique.
« Jean-Luc Steinmetz sait changer de voix et de voie en explorant la gamme des possibles. Toujours à la recherche de l’instant éblouissant qui l’emporterait, il affirme une écriture porteuse d’une fine connaissance de la poésie tant actuelle qu’inscrite aux siècles précédents. Dans l’infini apprentissage du monde.
Avec Suites et fins, à la fois cendres et semences, de multiples fins encouragent de perpétuels recommencements : ceux de la vie ou de l’écriture. Le livre insiste sur une telle position au monde, vouée à l’instant ou à des restes de mémoire. Une évidence se fait jour, l’arrivée, la construction de réalités poétiques ayant vertu – sans le proclamer – de manifeste. »
La forme :
Une couverture sobre et texturée (nervurée) à laquelle j’adhère, blanche,
agréable au toucher,
information à la discrétion du lecteur : c’est le « 1123 ème ouvrage » publié par Castor Astral,
un marque page joint, une petite attention au lecteur potentiel,
et les encres de Pierre Zanzhucchi qui ornent le recueil de poésie, conférant à l’ensemble une zénitude..
Le fond :
Composé de six parties et hommage certain à une certaine modernité poétique, les petits poèmes en prose en rappellent d’autres,
des séries de vers libres aussi,
pas étonnant pour ce spécialiste de Rimbaud, Mallarmé et Jaccotet.
« Commensemencements
Sur la rive emplie de fantômes
l’instituteur valaisan apparaît
faisant danser « au brumeux horizon » *
tout un poème de Verlaine.
L’heure de la classe s’achève. Je lui demande
(et pour toujours demande)
ce que veulent dire la musique et les vers.
Dans l’entrebâillement de la porte
ou l’embrasure de la fenêtre
pénètre un rayon. Il forme sur le dallage
la réponse
mais personne pour la traduire ce jour-là.
p.28″
*Echos hommage au poème saturnien VI / L’heure du berger
« La lune est rouge au brumeux horizon ;
Dans un brouillard qui danse, la prairie
S’endort fumeuse, et la grenouille crie
Par les joncs verts où circule un frisson ;
Les fleurs des eaux referment leurs corolles ;
Des peupliers profilent aux lointains,
Droits et serrés, leurs spectres incertains ;
Vers les buissons errent les lucioles ;
Les chats-huants s’éveillent, et sans bruit
Rament l’air noir avec leurs ailes lourdes,
Et le zénith s’emplit de lueurs sourdes.
Blanche, Vénus émerge, et c’est la Nuit. »
Une idée du ressassement, la poésie au service de la mémoire, saisir sur le vif, mais pas dans l’idée de figer l’instant, plus je pense ( mais ça n’engage que moi ) à la manière des résiliences, des échos savamment amenés au rythme des enjambements,
un éternel recommencement,
des blancs.
« Immuables et indifférents.
Quoi veille ?
Quels sont les pluriels et la valeur instinctive du singulier ?
Avec des questions en foule je passe le jour
comme on passe un fleuve.
Chacun ignore ce qu’il en est de l’autre rive.
Je m’abreuve de pensées primaires.
D’autres stagnent au fond de ma voix.
Atteindre est un vœu proféré
maintenant pour plus tard.
Ce qui n’a plus cours court en arrière.
Des arbres environnent les terres.
Le salut qu’ils adressent
répond à plusieurs désirs
informulés ou déformés.
La méditation prend toute la tête
ressort par les narines
comme un souffle exalté.
Au bout des doigts grésille ce moment
les rites usant les rebords de porcelaine
et quelque chose d’un amour que l’on regardera plus tard
parmi les archives filmées. » p.18″
1ère partie : Commensemencements, la thématique de la « semence » revient dans le recueil, associé à la naissance,
et à l’écriture,
« Dans tant de phrases qui glissent de la tête aux mains
les larmes coulent aisément, rires ou sanglots.
En quoi sont-elles importantes?
On donne, on reçoit gratis.
Le corps relaxé près du fleuve
s’éveille à sa force et connaît
la secrète faveur d’une seconde vie.p.64″
à l’image de la femme, à la nature et aux saisons, l’image du prunier également,
« Soma-séma-sémène, l’âme est une captive
traitée avec humanité
conservé en suspens
incapable d’avancer beaucoup plus loin que la vie.(etc..p.61) »
Celui-ci pourtant, se détache dans le recueil : le seul en majuscules, magistral…faut-il pour autant lui accorder plus de sens?
« UNE PHRASE
QUI PARLE DU SABLE QUI S’ECOULE
COMMENT N’AURAIT-ELLE PAS RAISON ? » p.37
Hommages pluriels à Verlaine, Breton, Villon, Bataille, Cendrars, Antelme…
Notez que seul,
un poème,
comporte un titre, p.67,
« 19 heures ».
Autre extrait :
« Commensemencements
Sur la rive emplie de fantômes
l’instituteur valaisan apparaît
faisant danser « au brumeux horizon » *
tout un poème de Verlaine.
L’heure de la classe s’achève. Je lui demande
(et pour toujours demande)
ce que veulent dire la musique et les vers.
Dans l’entrebâillement de la porte
ou l’embrasure de la fenêtre
pénètre un rayon. Il forme sur le dallage
la réponse
mais personne pour la traduire ce jour-là.
p.28
* Rappel de ce délicat poème saturnien
VI/L’heure du berger
La lune est rouge au brumeux horizon ;
Dans un brouillard qui danse, la prairie
S’endort fumeuse, et la grenouille crie
Par les joncs verts où circule un frisson ;
Les fleurs des eaux referment leurs corolles ;
Des peupliers profilent aux lointains,
Droits et serrés, leurs spectres incertains ;
Vers les buissons errent les lucioles ;
Les chats-huants s’éveillent, et sans bruit
Rament l’air noir avec leurs ailes lourdes,
Et le zénith s’emplit de lueurs sourdes.
Blanche, Vénus émerge, et c’est la Nuit.
Notez que les poèmes sont de longueur variable,
une strophe,
2/3/4,
ou un paragraphe,
ou quelques expressions…comme s’il ne voulait pas de carcan, célébration des formes, en tout genre,
Une section se distingue aussi par sa thématique, plus sombre, « Egéennes » 8 poèmes sur l’inacceptable, un cri de révolte,
suppléments d’informations donnés, sous chacun des poèmes
ex : « L’embarcation surchargée a chaviré, entraînant la mort de soixante-treize migrantts hommes, femmes et enfants (9/12/2015) ,p. 45 à la manière d’une légende, dont on s’imagine très bien quelle pourrait être la photo associée,qui me rappelle aussi le Radeau de la Méduse de Géricault.
Et cette section un peu folle…ROIDE ASILE, 17 réflexions comme issues d’un « esprit malade ». Une découverte sympathique que je n’aurai sans doute pas faite sans cette opération de Babélio.
Pour aller plus loin :
« Jean-Luc Steinmetz est né en 1940. Poète, essayiste, professeur à l’université de Nantes, il a publié les œuvres complètes de Rimbaud en trois volumes (Garnier-Flammarion).
Il est l’auteur de plusieurs essais sur la littérature, dont deux importantes biographies : Stéphane Mallarmé, l’absolu au jour le jour (Fayard, 1998), Arthur Rimbaud, Une question de présence (Tallandier, 1999) et Pétrus Borel, vocation poète maudit., et. A lire chez Zulma : Les Femmes de Rimbaud (2000).En outre son livre Le Jeu tigré des apparences (Castor Astral) lui a valu le Grand Prix de poésie de la SGDL et le prix Paul Verlaine. »
M.G
Matsuo Bashõ ( 1644-1695 )
On dirait
Le Pays des ombres.
Tachibana Hokushi ( 1665-1718 )