après 2 essais j’ai envoyé mon texte, le thème me parlait, la forme libre, le format..A4, on verra bien, fin juin..affaire à suivre.
« Communiqué de presse
GRAND CONCOURS FRANCOPHONE D’ÉCRITURE SUR LE THÈME: « MAMAN recto verso»
Lundi 8 mars au samedi 8 mai 2021
Du 8 mars au 8 mai 2021, Les Espaces Culturel E.Leclerc invitent tous les francophones à participer au grand concours d’écriture lancé par l’artiste plasticien Franck Ayroles. Le thème retenu «Maman recto verso », doit permettre à tous ceux qui souhaitent participer, d’exprimer leurs sentiments sur le sujet universel. Qu’il s’agisse de poèmes, lettres ou témoignages… Les meilleurs textes seront sélectionnés par un jury présidé par Julie Gayet (Actrice, Productrice), également Marraine de la Fondation des Femmes, et composé de David Foenkinos (Écrivain, Réalisateur), Christelle Chassagne (Adjointe Culture et Mécénat, Conseillère Régionale), Charlotte Ortega (Directrice Espace Culturel E.Leclerc Niort), Romain Le Roy et Françoise Bazerque (Responsables Librairie Espace Culturel E.Leclerc Niort), une Représentante de la Fondation des Femmes, Monique Jourdain, l’artiste Franck Ayroles et Asma Harrad Ayroles. La récompense? Faire partie des privilégiés qui verront leur œuvre publiée dans un livre d’art de Franck Ayroles. Le livre sera diffusé dans le réseau des Espaces Culturel E.Leclerc, les bénéfices seront reversés à la Fondation des Femmes. Le thème: Maman recto verso. Tous et toutes à vos plumes pour participer à ce concours d’écriture. Être maman ; qu’évoque ce sujet pour vous ? Laissez vos coeurs s’exprimer librement. Mettez à dessein vos expériences , vos émotions, pour livrer sincèrement vos histoires ( récits , poèmes , témoignages….) Soyez vrai.e.s , authentiques , singulier.e.s pour décrire vos sentiments sans jugement ( recto verso) : ( peurs , bonheurs, espoirs , frustrations, colères ,épanouissement , force , fragilité ….) tout état d’être, fait sens à la maternité. Que vous ayez choisi d’être maman , ou pas , que vous soyez une maman biologique ou d’adoption , mère d’accueil ou de substitution , en couple ou seule , maman d’un enfant différent ou dévastée par la perte prématurée de votre enfant ,une maman en alternance , itinérante : participez ! La parole des hommes est aussi primordiale pour aborder et nourrir cette thématique, quel regard portez vous sur les femmes, quelles qu’elles soient , dans leur rôle de mère? Que ce soit de vos mamans ou de l’absence de celles ci , de vos belles mamans , de la mère de vos enfants ou du double rôle à tenir sans la présence de celles ci , livrez vos émotions librement! La multidiversité de vos récits portera haut les couleurs de ce concours d’écriture ; faites preuve d’audace. Ecrivez sans tabous l’intensité de votre amour ! Réjouissez vous ou angoissez vous de voir grandir vos enfants , de les voir quitter le nid , espérez reconquérir l’amour d’un enfant avec lequel vous êtes fâché.e.s . Osez , sans préjugés , décrire le bouleversement suscité dans vos vies par l’arrivée d’un enfant , la transformation de votre corps , votre relation de couple , votre rapport au temps , aux autres , le baby blues ou la charge mentale et sociétale que cela a pu modifier . Participez ! Plus vous serez nombreux à concourir, plus bouleversant sera le livre consacré aux mamans . Ce concours sera peut-être une manière pour certains d’exprimer enfin leurs sentiments
Les relations humaines avaient commencé à se distendre,
puis à s’éroder,
s’étiolant dangereusement et ce, alors que les relations interconnectées s’étaient elles, considérablement étoffées.
Alors que les conversations de la vacuité fleurissaient, que tout à chacun exposaient délibérément et joyeusement ses affects débordants sur la démesurée « Toile », par écran interposé, les paroles, les mots entre humains dépérissaient tout aussi rapidement. Aussi, constatait-on que les humains, propriétaires de territoires extensibles d’amitiés fulgurantes, multipliant les quantités relationnelles, oubliaient de se nourrir de relations charitables et humanitaires. Si bien que les déserts de conversations arides, les sourires exilés, les pensées finirent par remplacer les conversations non virtuelles. Celles-ci étaient tout bonnement ..dépassées… pour le commun des mortels qui n’y trouvaient plus aucun intérêt. Les conversations entre pairs cessèrent donc pour se réduire a minima comme si le silence se suffisait à lui-même, si bien que chaque éclat de voix, chaque empreinte sonore, devenait heurt de la sensibilité. Cette impossibilité rendue contribua à dénaturer les rapports entre humains et ne simplifièrent pas les relations entre les deux sexes. Il devenait compliqué pour un homme de s’adresser à une femme de peur de la brusquer et de voir tous ses espoirs s’envoler, l’initiative frôlant l’impolitesse et l’incorrection ultime et pour une femme… cela dépassait l’entendement.
Le silence s’était érigé incommensurable,
ineffritable,
les paroles étant jugées bien trop dangereuses pour les jeux relationnels.
Il avait donc fallu trouver des parades pour assouvir et garantir la survie de l’espèce humaine…
Je remercie Babélio et son opération Masse Critique, ainsi que les éditions Apogée pour cette sélection.
4 ème :
« Ce recueil rassemble des notes prises entre 2001 et 2012. Il s’inscrit dans la continuité de Cendres vives (1980-1988), du Carré du ciel (1988-1996) puis de La Table de veille (1996-2001). Tenir ces carnets, à travers les années et les saisons de la vie, avec autant d’assiduité que de doutes, relève d’un désir obstiné de « veiller » sur la vie pour mieux l’étreindre, à défaut de la comprendre. »
Première rencontre pour moi avec Françoise Ascal par le biais de ce recueil.
Concernant la forme, et c’est plutôt rare que je m’exprime, si la couverture cartonnée est agréable au toucher, j’aurai aimé un format plus en adéquation avec le fond, de type carnet, ce qui aurait renforcé le rapport intime aux prises de notes. Et je m’étonnes de ce choix de couleur, sobre, mais intense..il m’intrigue (dû à l’éditeur même, à la thématique?)_________(étant moi-même adepte de petit carnet, pas nécessairement du Moleskine, même si c’est la référence…).
La prise de notes a été épurée, sélectionnée, elle s’apparente quelque peu au journal intime, ce sont des notes de lectures,
impressions du moment,
fugacités,
pensées sporadiques alignées, dont la lecture de prime abord n’est pas facilitée, par l’entreprise même, et qui paradoxalement peut apparaître pour certains lecteurs, plus confortable,
épisodique,
du coq à l’âne.
La prise de note est une extraction singulière, hors contexte, qui fait sens à son auteur et pas nécessairement à son lecteur qui à mon avis, n’accède qu’en partie, à son sens véritable, au visible. L’entreprise peut permettre toutefois une compréhension de l’auteur et des techniques sous- jacentes à l’écriture. »Ratissage de vieux carnets.(…) B.me rappelle que ratisser est une activité partagée par les moines et les jardiniers. »p43
Puis des thèmes communs apparaissent, à l’aune d’une seconde lecture, possible alors, de tisser des liens, éléments de biographie,
les onze ans voient les saisons défiler au gré des champs lexicaux, la nature, les paysages intérieurs se reflètent au travers la vue du « jardin, sous le cognassier.Chaleur et parfum. B. a suspendu un fushia dans les branches. Les ramures retombent avec grâce. Ni contemplation, ni méditation.Juste se laisser traverser. »p.11 « presque l’automne déjà, dans l’ambiance humide, la fraîcheur hâtive, l’abondance de fruits »p.19 qui contrastent avec les lectures plus graves « Lecture passionnante des journaux de Bauchau.Vision émouvante de cet homme de 88 ans, faisant chaque jour sa gymnastique matinale en répétant les mots de Maître Eckhart : « C’est aujourd’hui la fête, la plus grande fête, la fête à l’existence »p.20
Beaucoup de références aux auteurs et de citations extraites, »Louis-René Des Forêts, Michel Onfray, François Cheng, Maurice Bellet, des philosophes et là je me sens plus à l’aise avec Spinoza, Plotin, Nietzsche,Montaigne, Pindare, …
Il s’agit de p.106, « Revenir aux fondamentaux. Tenir le fil, en dépit des inévitables occasions de déstabilisation___contrariétés, colères,tristesses. Penser au souffle, qui ne peut décevoir, qui fait son travail de vie sans question. Le cultiver en conscience, le choyer, le protéger au mieux. »
Aperçu et petite sélection : le rapport à l’écriture
« Où me mène ce texte? A mon insu, la Chapelle de Ronchamp tend à s’amenuiser au profit d’autre chose, plus lié au monde d’aujourd’hui, à mes inquiétudes de société. Ce faisant, j’éprouve une joie à m’éloigner de ce journal. Sentiment de sortir de mon propre utérus.
« Trouver la vérité par l’écriture. La vérité m’intéresse plus que tout, plus que l’écriture.p.20
« Tout dans ma vie est sous le signe de l’arraché. C’est à l’arraché que je parviens à extraire les mots et à me garder vivante. »p.21 et des échos, répétitions qui amorcent de l’importance de cette idée » Ecrire à partie liée avec l’arrachement. Mais qu’ai-je à arracher ? Rien ne s’impose en toute nécessité. Mon vouloir est cérébral ».p.42 « Levée tôt, mais l’écriture, où est-elle? « Je » fais écran. »
« Nuit d’agitation, en quête des mots manquants. On n’écrit jamais que pour trouver les mots manquants. »p.45
« Mon rapport à l’écriture : encore et toujours »le métier de vivre ». Pas le souci de construire une oeuvre littéraire, mais l’ambition de repousser, si peu que ce soit, une part de ténèbres____en soi comme à l’extérieur »p.45..
Toujours ces préoccupations…et un éclairage,« bleu d’octobre : mon modèle. Voudrais écrire en atteignant cette transparence.La transparence n’est pas la pauvreté. Ecrire transparent donc lisible est souvent compris comme écrire banal, simpliste, sans profondeur.Alors qu’il s’agit d’accéder à une qualité de perception que le dépouillement permet. Où commence-t-il? Où s’arrête-t-il? La simplicité d’une écriture ne va pas de soi. Elle est fruit d’une approche patiente.Une ascèse presque. »p.48
« Personne ne m’a condamné à dire je.Je peux écrire d’un autre point de vue et avec les mêmes exigences.C’est le b.a.-ba de tout écrivain. Alors pourquoi est-ce impossible sous peine de culpabilité, de sentiment d’imposture? »p.64
« Qu’ai-je encore à arracher? Arrachement heureux affirme Marcel Cohen.Pour lui, l’arrachement, au trou est une remontée. Le malheur, c’est l’absence de mots. »
En 2012, de la poétique « Grand ciel bleu lavé par le vent. Lumière du Sud, du moins d’un sud tel que je le rêvais/imaginais. Toujours bien dans cette maison. C’est une expérience frappante. J’ai simplement changé de quelque 50 mètres et changé de niveau. Les deux maisons se font face, elles sont presque jumelles. Pourtant l’une e donnait le sentiment de me vider, l’autre me donne asile et bienfaisance. »p108.
Un recueil donc où l’on peut puiser quelques ondes, s’approprier quelques expressions et/ou se reconnaître, encore faut-il accepter l’intrusion dans cette intimité, ce qui ne va, je pense, pas de soi…sans doute parce que je méconnaissais l’auteur.
« J’appelle Conversation, tous les entretiens qu’ont toutes sortes de gens, qui se communiquent les uns aux autres, soit qu’on se rencontre par hazard, et qu’on ait que deux ou trois mots à se dire ; soit qu’on se promene ou qu’on voyage avec ses amis, ou mesme avec des personnes qu’on ne connoist pas ; soit qu’on se trouve à table avec des gens de bonne compagnie, soit qu’on aille voir des personnes qu’on aime, et c’est où l’on se communique le plus agréablement ; soit enfin que l’on se rende en quelque lieu d’assemblée, où l’on ne pense qu’à se divertir, comme en effet, c’est le principal but des entretiens. »
Chevalier de Méré, De la Conversation.
Une petite irruption, fracassante, évitement de fausses notes et de considérations météorologiques, imprévisible, je n’aimais être bousculé de mes pensées multiples.
J’étais, pour cette fin de soirée, honoré de ma flûte galante estampillée millésime, sirupeusement admiratif, candide et gai devant cette toile.C e vernissage était tout simplement délicieux, il laissait deviner les anamorphoses. Ce curateur avait fait un choix plus qu’audacieux, il fallait bien le reconnaître.
Puis,
__ »Et toi, tu fais quoi dans la vie ? » ( A cette ineptie, il était de bon ton de répondre par acronymes, avec suffisance, revers incorrigible annoncé par le tutoiement, il fallait faire son choix, ENSAPC, ENSAD, ENSBA, ESAAD, ESAIG, pour ne pas déteindre, aussi prétentieusement que possible et avancer un impitoyable « Je suis élève à l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux Arts de Paris »! ») C’était avec cette phrase qu’elle s’était immiscée, une phrase, somme toute banale, anodine, teintée de curiosité. On ne se connaissait absolument pas, mais la familiarité semblait naturelle, pas de fausse note, de larsen et pourtant le tutoiement intempestif, ce n’était vraiment pas dans mon tempérament. Je m’offusquais de ces pratiques que je jugeais plutôt vulgaires, j’apparaissais anachronisme totalitaire de mon époque, et pour le coup, aux yeux des autres, complètement impotent, décalé, et cela me convenait plutôt bien. J’avais répondu, donc, tout naturellement, juste à côté :
__ »Moi, je découvre, je tâtonne, je trébuche dans les regards sourds et les premières respirations, celles qui palpitent et transpirent… »
_ »C’est assez étonnant comme démarche, et peu courant, en effet » avait-elle hâtivement répondu, avant de détaler aussi brusquement qu’elle avait su faire irruption dans mes pensées. Elle avait ce quelque chose de l’Alice de Carroll, mais j’avais su couper court, et ne pas éterniser cette embryon de conversation.J’étais resté pantelant, immobile et songeur, la maudissant de cette interruption inopinée, étais retourné à mes occupations premières, toutes contemplatives, je voulais prolonger ce moment de grâce admirative, et n’ en être détourné, à aucun prix. Après tout, c’est ainsi que je m’inspirais…Je passais d’incommensurables heures, figé devant certaines oeuvres, à l’affût de chaque détail technique que je mémorisais, m’imbibant de chaque demi-teinte et nuance, devinant les coups de crayons des maîtres. Je révérais les romantiques, mais pas uniquement, assujetti à Friedrich, mendiant chaque oeuvre d’un regard nouveau, pour en éprouver davantage. Puis, je retournais dans ma misérable petite mansarde, mais nimbée de cette lumière obséquieuse, je jetais mon dévolu sur ces toiles vierges que j’avais depuis quelques temps dézinguées, fustigées, vieillies, boursouflées..Ce n’était pas mon premier coup d’essai, je poussais le perfectionnisme jusqu’à manier le pinceau des heures, poignet tantôt crispé et souple, pour parachever ma technique et m’approprier celle des autres…Mon éducation aux arts, mon talent avait suffit à faire éclater mon génie à l’école, alors j’avais déserté, je ne cherchais pas la renommée, je ne voulais pas briller, mes apparitions aux vernissages étaient quasi silencieuses, je voulais l’invisibilité, pour exceller indécemment, le statut de faussaire me convenait parfaitement et je ne cherchais pas à être identifié, je me cantonnais donc à écumer les galeries comme critique d’art officiel. Le reste n’était connu que de moi, je conservais mes faux et savait exactement à quel moment offrir une percée…J’en jubilais d’avance, et je comptais bien garder toujours un coup d’avance, l’invisibilité dans l’évidence, rester dans l’ombre.
pour toile de fond la haine féroce déployée par le nazisme.
Comme une malédiction familiale,
« Une perfection dans la violence.
La mort d’une jeune fille de dix-huit ans .
La mort de la promesse Franziska (mère de Charlotte) estime qu’il y a une hiérarchie dans l’horreur.
Un suicide quand on a un enfant est un suicide supérieur.
Dans la tragédie familiale, elle pourrait occuper la première place » p25 (NRF)
un héritage brutal teinté de mélancolie dépressive,
une idée de la folie,
« Sa démence n’offrant aucune pause, on ne la laissait jamais.On la surveillait sans cesse, potentiel assassin d’elle-même ».
Stolpersteine:
ou plaque commémorative aux déportés, celle de Charlotte…
Quand l’écrivain raconte dans Charlotte, un peu à la façon d’une mise en abyme, sa rencontre avec Charlotte Salomon,
c’est un hasard,
de l’ improbable,
puis un choc,
une obsession:
« On se crée des liens comme on peut »
« La connivence immédiate avec quelqu’un.
La sensation étrange d’être venu dans un lieu[…]
J’étais un pays occupé. »
les difficultés,
les recherches,
les prises de notes,
l’écrivain nous livre la genèse de Charlotte,
l’errance:
« J’ai parcouru son oeuvre sans cesse.
J’ai cité ou évoqué Charlotte dans plusieurs de mes romans.
J’ai tenté d’écrire ce livre tant de fois.[…]
Quelle forme mon obsession devait-elle prendre? […]
Et…il faut avouer,
la forme est assez
inédite,
du roman teinté d’éléments biographiques
à la typologie poétique,
alternances de blancs
et de rythmes qui balancent et qui se justifient
par l’écriture elle-même:
« Je n’arrivais pas à écrire deux phrases de suite.
Je me sentais à l’arrêt à chaque point.
Impossible d’avancer.C’était une sensation physique, une oppression.
J’éprouvais la nécessité d’aller à la ligne pour respirer.
Alors, j’ai compris qu’il fallait l’écrire ainsi ».(p.71).
Pari réussi…
Je ne connaissais pas l’artiste, me suis surprise pendant la lecture à chercher quelques unes de ses oeuvres, son histoire est sombre, un genre d’artiste maudite par son histoire personnelle et la tragédie familiale peu commune, comme si l’artiste ne pouvait s’épanouir que dans la torture ( j’entends psychologique comme physique) et comme si les synesthésies n’opéraient qu’effleurant une certaine idée de la souffrance…
Enchantée de cette première 4ème de couverture et de cette rencontre avec David Foenkinos,
j’appréhendais et je craignais une distorsion, un écart voir un fossé entre l’écriture et l’écrivain, il n’en est rien. Les correspondances sont bien là.
Cette 4ème a bien débuté dans le cadre intimiste et j’avoue apprécier le velours bordeaux et le décorum du théâtre de la Madeleine,
Foenkinos s’est présenté avec quelques minutes de retard arguant de la séduction du chaource qu’il venait de découvrir et d’apprécier, l’ambiance était chaleureuse et détendue.
Après quelques mots d’introduction, Gérard,son acolyte s’est chargé de lui poser quelques questions sur le roman, thème privilégié de cette soirée dont je vais tâcher de vous retranscrire quelques éléments en étant, je l’espère, fidèle.
A la question le romancier est-il finalement celui qui raconte, Foenkinos évoque les Souvenirs, roman qui se nourrit des émotions et s’attache aux relations intergénérationnelles, entre transmissions et tensions, sans pour autant être autobiographique, mais qui relance des réminiscences personnelles.Le thèmes de la mémoire, des souvenirs sont très présents dans ses romans, dans Charlotte aussi, dont il nous avoue qu’il a trimé plus de dix années, de façon quasi obsessionnelle, pour en venir à bout et, dont il s’étonne encore du succès.Une admiration certaine pour Charlotte Salomon, comme si les lieux portaient une mémoire, avec cette jolie mais très juste expression de la « mémoire des fourchettes » où comment certains objets au demeurant quelconques, banales peuvent à eux seuls faire force évocatrice.
La mémoire se propage dans Charlotte
pourtant sombre avec les suicides, il a tenté pourtant comme dans ses autres romans, de conserver une certaine « légèreté » ( je pense au titre de Kundera dès que j’entends ce mot), il la trouve magnifique, « j’adore le divertissement », » ce n’est pas antinomique de la profondeur ».Il avoue avoir « un joyeux rapport aux choses », une autre expression que j’apprécie et que j’envie, et se dit admiratif devant le travail des professeurs.
Il nous fait sourire en évoquant une petite anecdote : il s’étonne de la Mgen (régime générale d’affiliation de l’éducation nationale) qui gère deux centres affectés aux pathologies dépressives et se nomment Van Gogh et Camille Claudel, quand on connaît la vie et de ceux-ci, l’évocation sonne « bizarre »...
Charlotte est le plus grave, le plus sombre, le plus mélancolique et noir de ses romans, mais il ressent quelque chose de l’ordre de l’ontologique, ce qui lui plaît, le fascine chez elle, c’est cette »force de résistance », la beauté visuelle qui semble auréolée cette personnalité, la lumière qui semble se diffuser tout doux, conception que je conçois facilement, comme si certains êtres semblaient irradier..Gérard, très bavard et curieux (que voulez-vous ce sont les philosophes !) demande ensuite à Foenkinos si ses personnages ne sont pas fatalement liés à une destinée car cela semble être le cas dans la plupart de ses romans.Effectivement, Lennon, Dans la peau de John Lennon, plus près de l’autobiographie dans son genre j’entends, retrace le cheminement émotionnel, les blessures de l’enfance quelque chose d’irréparable qu’il retrouve avec Charlotte; elle porte en elle » l’atavisme morbide de sa propre vie », elle va tout surmonter, va créer une oeuvre pleine de vie, de beauté, mais est effectivement rattrapée par la fatalité de l’Histoire.
Avec un de ses premiers romans Je vais mieux
dans lequel le protagoniste en a littéralement « plein de dos« , Foenkinos devient pour certains lecteurs un ostéopathe et il s’en étonne aussi, même, s’il comprend.
Gérard poursuit et là j’avoue, c’est une question que j’attendais au rapport à l’écriture:« Est-ce que ce sont les mots qui viennent à toi ou quelque chose d’autre? Comment fait-on une bonne histoirE? quelle recette du succès? »
L’inspiration oui s’impose d’ellemême, jaillit, mais il y aussi quelque chose de l’ordre….de .. »l’improbable », il n’a pas écrit une ligne depuis près d’une année, avoue que le désir d’écriture est« tributaire d’une attente » ce qui la rend d’autant plus magique, et non pas technique, quelque chose ‘irrationnelle, vraiment et puis petite pointe d’humour « j’ai du talent » sans prétention aucune, je vous assure .
D’ailleurs, il nous relate ses moments de difficultés avec une pointe amusée : des lettres d’amour assorties à des râteaux, une rencontre avec un public désert et absent (la jeune femme qui attend son mari et ses clés en librairie et qui n’attend pas de rencontrer l’écrivain), « le plus dur c’est de mettre un mot sur ce que l’on ressent », il peut y avoir un très long cheminement, c’est d’ailleurs parfois « surprenant ».
Question suivante : penses-tu ce tu écris correspond à un public, un temps et que c’est ce qui explique ton succès ?
Il ne le cherche pas en tout cas et se défend de toute entreprise racoleuse et commerciale, il avoue que dans le succès il s’est senti comme dans Truman show, le succès arrive comme une étrangeté, mais il ne le cherche pas, et ‘ailleurs cela semble inutile, ce n’est pas le motif d’écriture, l’écriture ( il nous explique qu’il a été un lecteur tardif, vers ses 16 ans, pas de fibre littéraire innée ) est devenue plus qu’une évidence une nécessité dans sa vie, un incontournable, vital presque, et ne pas suivre cette voie c’est bien pire que de pas être publié ou méconnu, il repense aux difficultés de Proust par exemple, le livre, la publication c’est comme la« matérialisation de l’indifférence générale » et évoque son dernier roman conçu comme un polar, où son personnage un pizzaiolo apparaît comme un « François Mittérand de la pizza » dans le mystère Henri Pick.
Foenkinos évoque le rapport à la lecture, tout se passe comme si le lecteur s’évertuait à traquer des similitudes, parcours de vie, résonances, plus ou moins consciemment d’ailleurs..Gérard rebondit alors, selon toi, David, 2016 : année de la victoire de la forme? Disons que pour Foenkinos le superficiel, la légèreté y compris dans la forme ne sont une insulte à l’intelligence, bien au contraire, mais qu’il ne cherche pas la force polémique, il repense notamment au tapage de Soumission pour Houellebecq et à cette façon d’en faire des caisses, il considère que le succès ne peut durer sans un texte qui touche les gens, le public.
L’oeuvre est une passerelle émotionnelle, la mémoire au travers de prismes…Charlotte se dénote car elle apparaît pour lui comme son oeuvre magistrale, celle qui a prise et investie le plus son énergie littéraire, il se sent bouleversé par son oeuvre, dont il a longtemps été animé, celle par laquelle il retrouve cette fameuse adéquation, moment de perfection dans la création , ce moment d’être en « rond » , où l’écriture est comme « un adultère du moi-même ».
Enfin, le public a pris la parole et j’avoue ne pas pouvoir tout retranscrire, juste que s’il ne varie pas le genre en restant dans le romanesque je lui trouve beaucoup de moments de poésie ( j’ai évoqué le Potentiel ainsi qu’ un passage de Avez-vous la tête de l’emploi ? , et surtout le jeu des prénoms) qui touchent, avec Délicatesse, et je me suis laissée prise au jeu des dédicaces.
Gilles voulait briser cette chape de plomb qui s’était immiscée sournoisement là.
Il redoutait sa robustesse, et se disait que peut-être à la dérobade, il pourrait…Il glisserait ce mot qui ferait tout fondre. Après tout, il l’avait bien cherché, il lui avait dit, à Elle, presque hurlé, à Elle, et aux murmures d’antan. Il avait redouté ce basculement, l’effondrement des tours, celles qu’il avait mis tant de temps à ériger, de mains de maître.
La peur connaît ce moment fatidique, celui de la déformation des prismes de l’objectivation, celui où le pouls transpire jusqu’à s’éclater les tympans, de irrespirable ou de la suffocation.Les côtes semblent s’enfoncer dans la chair, la cage thoracique marquée par l’oppression soudaine et incompressible, la gorge se rétrécir, s’assécher… désertique.
Presque… un regret… de ceux qu’on appelle de manière incantatoire et si…et si..et si.. et si.
Carrie s’était frayée un chemin, de ceux qu’elle trouvait rare, inestimable, tout doux, sans même s’en apercevoir, de la compréhension. Plutôt que de saper les fondations, elle préférait en consolider d’autres, c’est une chose que de vouloir poursuivre, mais on n’accroche pas le fuyant, il s’échappe, il s’engouffre et se dérobe, alors, c’est l’emmurement.
Elle avait minutieusement pensé son projet : sur fond de parc bucolique, une belle après-midi où l’été indien vous gâte exagérément de ses couleurs automnales, elle se laisserait glisser des berges, vue sur le lac, comme enivrée et happée, juste le temps d’une… é-chappe.
Fin.
Plus de plomb pour Gilles…Une stèle marbrée, et plus rien ne pouvait la fissurer, l’effriter d’autre que les larmes, les mots restaient comme suspendus..